Nos 4 témoins consacrent leur temps – libre ou professionnel – à protéger les autres. Écoute, réactivité, dévouement: chaque jour, nous leur devons beaucoup. Elles nous racontent…
Qu’elles soient pompière, ambulancière ou secouriste bénévole, toutes sont animées par une passion commune: venir en aide à autrui. Au cœur de l’action, elles se sentent à leur place et ne s’imaginent pas exercer un autre métier. À travers leurs témoignages, elles nous racontent un quotidien fait de défis, mais aussi de satisfactions immenses.
Lauranne, 23 ans, ambulancière militaire: “Je profite encore plus de la vie”
“Je suis doublement ambulancière: militaire de métier, mais aussi bénévole pour la Croix-Rouge. J’ai grandi auprès d’un beau-père paracommando et depuis toute petite, j’étais émerveillée par ce monde: je visitais la caserne à la moindre occasion! Intéressée par le domaine médical, je voulais aussi un métier où le quotidien n’est pas monotone. J’ai toujours été à la recherche de l’action, de l’inattendu et de l’aventure! Depuis 2022, je suis donc aussi ambulancière 112 et très épanouie dans ce que je fais.”

Plus qu’un métier, une passion
“Pour moi, c’est bien plus qu’un métier: c’est une passion! En tant qu’ambulancière AMU (d’aide médicale urgente), je suis la première intervenante à me rendre auprès des victimes, des patients, des familles ou des passants, qui composent le numéro 112. Je dois faire face à des situations du quotidien (crises d’angoisse, chutes sans gravité, bagarres…) ou d’urgences (personnes sous emprise de l’alcool, de stupéfiants; troubles respiratoires, cardiaques, réanimations, tentatives de suicide, accidents de la route…).
Au quotidien, les challenges ne manquent pas! Trouver sa place en tant que femme n’est pas toujours facile en intervention. Je dois souvent prouver que je suis tout autant capable que mes collègues masculins de manipuler les patients ou mon brancard. La gestion des patients en détresse psychiatrique est également compliquée. Tout comme les situations où notre propre sécurité, ainsi que celle du patient, sont mises en danger (environnements insalubres ou périlleux, incendies, risques l’électrocution, de criminalité…).”
Apprentissages et défis du quotidien
“Mon métier est une vraie vocation! J’aime son côté humain et empathique, et son côté imprévisible et excitant. L’adrénaline qui m’envahit lorsque nous sommes envoyés sur une mission importante qui demande beaucoup de réflexion, de mise en pratique de certains actes médicaux. C’est aussi un métier de rencontres: grâce à mes collègues, j’évolue au sein d’une grande famille. Je travaille dans une ambiance joyeuse, énergique et remplie d’humour, d’amour, d’écoute et d’entraide. Oui, c’est un métier exigeant, qui demande de la patience, de la rigueur, de la concentration, mais c’est aussi – et quelle chance! – un métier où l’on apprend chaque jour, je n’aurai jamais fini de me perfectionner!”
Rester forte malgré les épreuves
“La contrepartie, ce sont ces situations douloureuses que l’on a du mal à oublier… Je repense à cette journée où j’ai été envoyée en mission pour 2 arrêts cardiaques à la suite l’un de l’autre et où je n’ai pu ramener aucun des patients… Ces échecs, il faut les accepter, les encaisser, continuer de vivre en contenant ses propres émotions et se persuader que l’on a fait du bon travail malgré tout… De manière générale, j’essaie de ne retenir que le positif: le câlin chaleureux et les remerciements d’une personne âgée reconnaissante quand j’ai passé une heure à lui tenir la main alors que personne ne l’avait fait depuis si longtemps. Amener un patient souriant à l’hôpital alors que 30 minutes plus tôt, il avait l’impression de traverser la pire journée de sa vie…
Trouver sa place en tant que femme n’est pas toujours facile en intervention.
Je sors grandie de ces expériences et n’ai plus peur d’être confrontée à la mort. En revanche, j’ai de plus en plus peur de perdre les miens ou de les voir souffrir comme je vois souffrir certains de mes patients… Je profite encore plus de la vie, car je sais mieux que personne qu’elle ne tient qu’à un fil. C’est pourquoi chaque soir, je veille à me coucher avec le sourire, sans regret, en ayant réalisé un maximum de choses qui me tenaient à cœur.”
Aurélie, 35 ans, infirmière en soins intensifs: “Je dois souvent retenir mes larmes”
“Je suis infirmière en soins intensifs depuis 2011. Depuis quelques semaines, je travaille à la Clinique Saint-Jean en équipe ‘hybride’. J’alterne un mois sur deux entre les soins intensifs et les urgences. Aux soins intensifs, il y a à la fois une part de routine avec les soins quotidiens et la prise des paramètres toutes les 3 heures, mais aussi des imprévus auxquels on doit s’adapter: suivis post-opératoire (après une chirurgie cardiaque, neurologique…), pneumonies, intoxications, Covid, chocs septiques, accidents de la route, troubles vasculaires, diabète, toxicomanies (alcool/drogues)… Je suis vraiment confrontée à différents scénarios sur le plan médical. J’accompagne aussi les patients et leurs familles sur le plan humain.”

Entre la vie et la mort
“Au quotidien, je côtoie autant la vie (dans ce service, nous avons tout le matériel nécessaire pour offrir toutes leurs chances aux patients) que la mort. La plupart du temps, je l’accepte assez facilement, car je sais qu’on a tout entrepris pour sauver la personne, c’est juste la nature qui a pris le dessus, malgré nos efforts. Mais cela reste dur d’accompagner les proches. Leur peine me touche à chaque fois. Quand ils pleurent, je dois souvent retenir mes larmes. Et s’il y a des enfants en bas âge, c’est encore plus difficile. Cela me renvoie sans doute à ma propre vie (j’ai 2 garçons de 4 et 9 ans)…”
Trouver sa place
“La difficulté aussi de ce métier, c’est l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. La variabilité des horaires d’un mois à l’autre, passer d’un travail de jour à un travail de nuit, finir tard certains jours, commencer tôt le lendemain, travailler un week-end sur trois, partir et rentrer quand mes enfants dorment, ne pas les voir du tout certains jours, travailler les jours fériés, les fêtes, être sans cesse en décalage avec les autres… Être maman et infirmière est un vrai défi, une course non-stop et sans coéquipier, ce serait très compliqué! Heureusement pour moi, mon mari est très présent et notre agenda partagé permet de nous y retrouver!
Je m’investis entièrement, mais c’est naturel: je ne pourrais pas faire les choses à moitié.
En dehors de cela, et même si le travail est lourd et épuisant, je travaille dans une ambiance exceptionnelle, avec des collègues en or. Ils sont comme une seconde famille pour moi et ça fait toute la différence. J’adore ce métier: je l’ai choisi parce qu’il était important pour moi de me sentir utile. J’aime être en relation avec les gens, les soigner, leur apporter du réconfort. Cela donne du sens à mes actions. Depuis le premier jour, j’ai le sentiment d’être à ma juste place et 14 ans plus tard, ce sentiment ne m’a pas quittée: je me sens chanceuse! Je m’investis entièrement, mais c’est naturel. Je ne pourrais pas faire les choses à moitié; avec moi, c’est tout ou rien!”
Les petits bonheurs
“Il y a aussi de ‘beaux moments’ dans le malheur. Comme ce patient qui est arrivé, il y a quelque mois, avec un pronostic vital engagé et très peu de chances de survie lors d’une opération à haut risque. J’ai tout fait pour que son épouse arrive à temps pour lui dire au revoir et je suis vraiment heureuse d’avoir contribué à ce dernier échange, qu’ils aient pu au moins avoir ce moment à eux. Mourir seul, il n’y a rien de pire…
J’espère que j’aurai toujours cette flamme, que je continuerai à exercer ce métier de tout mon cœur sans modération. C’est une expérience humaine intense et riche que je recommande à tous. Il y a tant de besoins, tant de domaines différents dans les soins infirmiers qu’il est toujours possible de trouver chaussure à son pied!”
Stéphanie, 44 ans, opératrice 112 (à Namur): “Ce que j’aime, c’est l’imprévu”
“J’ai commencé à travailler à la centrale 112, il y a 2 ans et demi, après avoir travaillé pendant 15 ans dans l’enseignement. Cela faisait déjà quelques années que je souhaitais me réorienter professionnellement et le métier d’opératrice 112 s’est présenté à moi comme une évidence. Il me permettait de partager ma vie professionnelle entre le travail de régulation (opératrice 112) et les interventions de terrain (en tant qu’ambulancière volontaire).”

Un travail de précision
“Aujourd’hui, j’ai la chance d’exercer un métier qui est une vraie passion! Je travaille pendant 12 heures, de jour comme de nuit, ainsi que les week-ends et les jours fériés. Je décroche des appels 112 (pompiers et ambulances), des appels 1722 (demande d’intervention non urgente des pompiers) et des appels 1733 (médecine de garde). Nous analysons la situation et envoyons les moyens adéquats (ambulances, PIT, SMUR, pompiers, médecins de garde).
Au quotidien, je suis confrontée à des situations dramatiques comme des accidents impliquant des enfants, des situations d’arrêt cardiaque où nous aidons les appelants à effectuer une réanimation. Il y a aussi des appels plus cocasses… Dans tous les cas, je me dois de garder mon calme, de gérer mon stress et mes émotions, pour pouvoir communiquer efficacement et prendre des décisions rapidement, notamment dans les situations tragiques.”
“La communication avec les appelants n’est pas toujours simple. Difficile de faire comprendre aux personnes pourquoi nous posons autant de questions, surtout dans des situations d’urgence. Pourtant, ces questions sont essentielles, car elles suivent des protocoles stricts conçus pour évaluer la situation, prioriser les secours et garantir qu’ils arrivent avec les informations nécessaires. Ce sont elles qui permettent d’optimiser la prise en charge: il ne faut pas confondre urgence et précipitation!”
La force de la solidarité
“Dernièrement, j’ai eu un appel d’une dame qui s’était perdue depuis plusieurs heures lors d’une randonnée, elle était épuisée et blessée à la cheville. Elle a pu être secourue parce qu’elle avait installé l’application 112, ce qui nous a permis de la géolocaliser précisément. Quel soulagement pour les équipes!
Ce que j’aime dans ce métier, c’est l’imprévu. Quand je me lève le matin, je ne sais pas ce qui m’attend dans la journée; chaque jour est différent. On ne s’ennuie jamais et le fait de travailler en équipe est motivant. Nous nous soutenons mutuellement face à des situations difficiles. Sauver des vies crée une solidarité forte et un véritable esprit d’équipe. Ce métier me pousse aussi à réfléchir sur ma propre vie, à apprécier ce que j’ai. Être confrontée à des situations d’urgence me rappelle la chance d’être en bonne santé et en sécurité: cela m’aide à relativiser les petits soucis du quotidien.
Il est important de se former aux gestes de premiers secours, ils permettent parfois de sauver des vies.
J’aimerais souligner l’importance de se former aux gestes de premiers secours, qui permettent parfois de sauver des vies avant l’arrivée des moyens médicaux. Mais aussi l’utilité, pour tous, d’installer l’application 112 sur son téléphone qui permet une localisation précise des appelants même si ceux-ci ne peuvent pas expliquer leur position. C’est un énorme gain de temps pour nous et une plus grande chance de survie pour tous!”
Line, 39 ans, pompier caporal: “J’ai dû me forger une carapace”
“Le métier de pompier a été une révélation pour moi. Je n’y avais jamais songé avant de devenir, un peu par hasard, pompière et ambulancière volontaire. Il y a 20 ans, il y avait encore très peu de femmes dans ce métier, mais cela m’a tout de suite plu et j’ai décidé de passer professionnelle. Mes journées sont assez définies sur le papier, beaucoup moins en réalité: l’intervention prime et nous sommes susceptibles de partir à tout moment. Je travaille par tranches de 24 heures: de 7h le matin jusqu’à 7h le lendemain, avant d’enchaîner 3 jours de repos.”

1000 métiers en un
“Nos missions sont très variées (cela peut aller du sauvetage de chat dans un arbre à un incendie de maison, en passant par la destruction de nids de guêpes ou une désincarcération sur l’autoroute…) et aucune journée ne se ressemble. De ce fait, on n’est jamais vraiment préparés mentalement quand on reçoit un appel. Parfois, on est appelés pour une ‘personne qui ne va pas bien’ et sur place, on découvre une intoxication au monoxyde de carbone pour toute la famille. À l’inverse, on peut être appelés en urgence pour un feu qui n’est en fait que des déchets brûlant dans une poubelle où quelqu’un a jeté sa cigarette. Un seau d’eau et c’est éteint…
D’autres choses peuvent être plus difficiles à gérer: le stress dans les situations oppressantes, le manque de sommeil (léger et souvent interrompu la nuit à la caserne), la polyvalence que l’on doit avoir dans de nombreux domaines et le nombre de situations dramatiques que l’on voit chaque année. Les suicides notamment me marquent beaucoup par la tristesse, la colère et l’incompréhension que cela laisse chez les proches… J’ai dû me forger une carapace pour pouvoir effectuer mon travail sans me laisser envahir par mes émotions et rester concentrée. Mais je ne changerais de job pour rien au monde.”
Équilibrer vie professionnelle et vie privée
“C’est un métier difficile, c’est vrai. Il faut être en forme physiquement, mentalement, savoir s’adapter, écouter, être diplomate, se former quotidiennement, savoir se plier à la hiérarchie, réussir à se faire une place dans un milieu encore fort machiste… Mais c’est un beau challenge!
J’essaie de ne pas rapporter mes interventions à la maison, même si parfois j’ai besoin d’en parler.
Mon métier comprend pas mal de remises en question. J’essaie par exemple de ne pas rapporter mes interventions à la maison, même si parfois j’ai besoin d’en parler pour les faire sortir de ma tête. Le danger, avec tout ce que je vois, est de faire un parallèle avec ma vie personnelle… Je relativise beaucoup sur des situations qui peuvent paraître graves aux yeux de quelqu’un d’autre, mais qui, pour moi, sont tout à fait banales. Cela crée parfois un décalage avec mes proches.
J’essaie aussi d’équilibrer mon côté féminin et mon côté masculin. Mon métier influence mon look ou mon langage, forcément. J’ai un caractère fort, je suis assez indépendante et cela m’aide dans mon travail. Mais il me faut réguler tout cela dans ma vie privée… Ce qui me fait tenir? Entendre mon petit garçon qui est très fier de dire: “Ma maman est pompier!” (sourire). Plus sérieusement, je n’ai pas l’impression de devoir ‘tenir’: ce métier, c’est une vraie passion, je ne vois pas ce que je pourrais faire d’autre… à part passer ma vie à voyager!”
Télécharger l’application 112
Une seule application pour 3 services d’urgence/de secours (pompiers, ambulances et police), dotée de 5 fonctionnalités essentielles:
– Rappel des numéros d’appel d’urgence: sélectionnez simplement l’icône correspondant au service approprié.
– Géolocalisation grâce à la fonction GPS de votre smartphone, ce qui accélère l’intervention sur place.
– Résumé de vos informations médicales importantes (diabète, surdité, problèmes cardiaques, allergies, etc.) directement à disposition des intervenants.
– Communication avec les services d’urgence via des messages texte/SMS si vous êtes incapable de parler ou d’entendre.
– Activation de la sonnerie de votre téléphone pour aider les services de secours à vous localiser, si vous êtes inconscient(e) ou difficile à trouver.
L’application est gratuite et fonctionne sans connexion Internet: 112.be/fr
Merci à la Croix-Rouge, au Centre de Prévention du Suicide et à la Direction générale de la Sécurité civile pour leur aide.
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